Un ballet pour Carnaval

Les Fées des forêts de Saint-Germain fut dansé au Louvre à l’occasion du Carnaval par Louis XIII et son entourage le 11 février 1625. Le dessein fut conçu par Henri de Savoie, duc de Nemours, alors en charge des fêtes de la cour, qui eut ensuite « la curiosité d’en faire de grands livres où toutes les entrées étaient peintes en miniature » (Tallemant des Réaux), d’après les maquettes de costumes de Daniel Rabel. Les vers furent écrits par René Boudier, les danses composées par Jacques de Belleville, et les récits par Antoine Boësset.

Il était organisé en cinq « ballets » conduits chacun par une fée tutélaire des divertissements : « Guillemine la Quinteuse, Robine la Hasardeuse, Jacqueline l’Entendue, Alison la Hargneuse, et Macette la Caprioleuse […] ; la première présidant à la Musique ; la seconde, aux Jeux de hasard ; la troisième, aux diverses espèces de Folie ; la quatrième, aux Combats, et la dernière, à la Danse » (Marolles). Formant la principale entrée de la suite de Macette, juste avant le grand ballet final, les « Bilboquets », d’abord immobiles, s’animèrent de manière éblouissante, évoquant les soubresauts du célèbre jeu d’adresse.

Ce ballet est une parodie humoristique des ballets mélodramatiques jusqu’alors à la mode, vraisemblablement sous l’influence italienne de Concini et de Marie de Médicis. Il fut illustré par vingt-neuf dessins, dont les originaux de Daniel Rabel sont conservés au Louvre. Ces spectacles réunissaient des costumes divers : mythologiques, allégoriques, exotiques, grotesques, auxquels Daniel Rabel collabora.

Le roi dansait notamment dans le rôle d’un « vaillant combattant », tandis que son frère, Gaston d’Orléans (1608-1660), âgé de seize ans, jouait un « demi-fou ». Les entrées ont été conservées grâce à une copie de l’atelier Philidor. Les airs de Boësset furent publiés dans le Livre XIII des Airs de cour avec la tablature de luth, d’Antoine Boesset, par Ballard en 1626. Les airs à voix seule sont conservés à la Bibliothèque Nationale.

Un livret (partiel ?) est accessible sur Gallica et certains des textes sur la base Philidor. Les dessins aquarellés du Ballet des fées sont conservés à la BnF (Estampes) et peuvent être consultés sur le site de la RMN ou sur Gallica, source des images ici présentes. 

Quatre des airs de ce ballet ont été enregistrés par le Poème Harmonique et sont disponibles chez Alpha et sur les sites habituels de streaming.

Synopsis 

Acte I

Première entrée Récit de Guillemine-la-Quinteuse, fée de la Musique, qui préside sur les accords et les consonnances.
Air d’Antoine Boësset : Un concert bien mélodieux n’est pas ce que j’ayme le mieux pour une voix et luth ou guitare en alternance avec un chœur à 4 (dessus, haute-contre, taille et basse avec basse-continue).

Deuxième entrée : Entrée de Guillemine-la-Quinteuse, fée de la Musique.

Troisième entrée : Guillemette fait venir sur scène la Musique, sous la forme d’un immense mannequin d’osier portant autour de la taille (en guise de vertugadin, qui ornait alors les robes des dames) des luths et des théorbes.

Quatrième et Cinquième entrées : Entrée des musiciens-chasseurs de campagne, fatigués d’avoir chassé le Cerf parmi les ronces et les épines, qui font un ballet en sonnant du cor. 

Sixième entrée : Les musiciens décrochent les luths et théorbes fixés autour de la robe du mannequin de la Musique et dansent un ballet au doux chant de leurs voix et de leurs luths.Air de Boesset : Amour ravy de vos attraits, à quatre plus basse continue.

Septième entrée : Guillemine la Quinteuse, pour adoucir le tintamarre de ses charivaris, introduit un ballet de Chaconistes espagnols (*), tant Cavaliers que Dames, jouant de la guitare.(*) dont un joué par le roi Louis XIII

Huitième entrée : Deuxième air pour les musiciens espagnols jouant de la guitare et dansant.

Acte II

Neuvième entrée : Gillette-la-Hazardeuse, fée des Joueurs, envoye son Récit, couvert de ses livrées, avant de faire son entrée.Air de Boesset : Les joüeurs sousmis à mes loix Ont un agreable caprice.

Dixième entrée : Gillette attire sur scène un tourniquet mobile autour duquel des laquais et des Bertrans dansent un ballet.

Onzième entrée : Entrée des Esprits Follets, joueurs de balle forcée.

Douzième entrée : Entrée d’Esprits portant un marelier (*)(*) marelier : tablier sur lequel se jouait le jeu de la marelle, dérivé du tric-trac

Treizième entrée : Des personnages, figurant des pions du jeu du Renard et des Poules viennent se positionner sur le marelier.

Acte III

Quatorzième entrée : Jacqueline-l’Entendue (*), fée des Estropiés de la Cervelle, se fait annoncer par son récit avant de faire son entrée, accompagnée d’un hibou.(*) le rôle était joué par Roger du Plessis, duc de Liancourt, Premier Gentilhomme de la Chambre, cousin de Richelieu et excellent danseur, qui ne faisait que mimer, les voix chantant en arrière
Air de Boësset : Il n’est si fameux Empirique, s’il n’affronte mon art magique. Voix seule et luth alternant avec chœur à 2.

Quinzième entrée : Entrée des Embabouinés (*)(*) parmi eux figurait le nouveau favori du Roi, le comte de Chalais, qui devait finir décapité

Seizième entrée : Entrée des Demi-Fous (*)(*) les demi-fous étaient conduits par, Gaston d’Orléans, frère du roi, dit Monsieur, les autres étant le duc d’Elbeuf, Alexandre de Vendôme et Monsieur de Souvray

Dix-septième entrée : Entrée des Fantasques (*)(*) les Fantasques étaient le comte de Soissons, Montmorency, le duc d’Aluyn et Monsieur de Blainville

Dix-huitième entrée : Entrée des Esperlucates

Acte IV

19è entrée : Alizon-la-Hargneuse, fée des Vaillants Combattants, se fait annoncer par son récit avant de faire son entrée.

Air de Boësset : Mes combattans que Mars ne sçauroit égaller D’exploicts & de gloire sont riches. Voix seule et luth (la version polyphonique ne nous est pas parvenue).

Vingtième entrée : Entrée des Vaillans Combattants (le roi représente un combattant)

Vingt-et-unième entrée : Entrée des Coupe-Teste. Les Coupe-Teste portent des costumes munis de faux bras et de fausses têtes en carton, qu’ils se coupent à coups de sabres et font voler dans tous les sens.  

Vingt-deuxième entrée : Entrée des Médecins armés, montés sur leurs mules

Acte V

Vingt-troisième entrée : Macette-la-Cabrioleuse, fée de la Danse, se fait annoncer par son récit avant de faire son entrée. Air de Boësset : Qu’on ne me rompe les oreilles De ces fabuleuses merveilles ! Voix seule et luth alternant avec chœur à deux.

Vingt-quatrième entrée : Entrée des Bilboquets inanimés

Vingt-cinquième entrée : Entrée des Bilboquets escamotés

Vingt-sixième entrée : Grand Ballet Final

 Texte des vers disponible sur livretsbaroques.fr

Une reinterpretation moderne

Les Fées des forêts de Saint-Germain (1625) – Centre de musique baroque de Versailles, decembre 2012

coproduction Centre de musique baroque de Versailles (CMBV),
La Cité de la Musique | L’Arsenal (Metz en Scènes)

création le 10 novembre 2012 à l’Opéra Royal de Versailles

écriture, mise en scène et conception scénographique Cécile Roussat & Julien Lubek | direction musicale Olivier Schneebeli | réalisation décors Antoine Milian | costumes Sylvie Skinazi | lumières Julien Lubek | maquillages Georgia Neveu | acrobates Simone Benedetti, Pedro Guerra, Liz Braga Guimaraes, Rocco Leflem, Ghislain Ramage / Guillaume Juncar, Caroline Siméon | musiciens Les Symphonistes du Centre de Musique Baroque de Versailles et Jean-Claude Welche | chanteurs Les Pages du CMBV, et Jean-François Novelli

Vía https://bibliodyssey.blogspot.com/2012/07/the-fairy-ballet-carnival.html et https://operabaroque.fr/BOESSET_FORESTS.htm